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  • Lucie 84

    Et une p'tite page, une!

     

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    Une nouvelle créature s'écrasa dans la neige, son corps massif glissant en arrière de quelques mètres le long de la pente, laissant une traînée de sang. Velázquez l'avait touchée à la base du cou, juste au-dessus de la poitrine ; il avait rapidement déterminé qu'il s'agissait d'un point faible, moins protégé par la peau épaisse de ces monstres. Elle s'agitait encore, donnant des coups de pattes furieux dans le vide en sifflant de douleur, et agonisa durant de longue secondes, sa queue frétillant tel un serpent jusque dans ses derniers instants. Autour d'elle, ses comparses stoppèrent leur course, leurs yeux brillants essayant de déterminer l'origine de la mort qui les fauchait dans leur élan. Plus d'une fois, Velázquez eu la très désagréable impression d'avoir été repéré, et il avait la certitude que ces monstres avait compris la menace qu'il représentait d'une manière que d'autres animaux n'auraient jamais pu imaginer...et qu'elles étaient en train de réfléchir à la meilleure manière d'y mettre fin. Il pouvait déjà constater qu'elles s'arrêtaient de moins en moins longtemps lorsqu'il en tuait une, lui laissant moins de temps pour recharger son fusil de précision, et viser correctement. Mais une créature tombait sous chacun de ses coups, ce qui les avait rendues plutôt prudentes...jusqu'à maintenant.

    Velázquez ne savait plus depuis combien de temps il était étendu là, au sommet de cette colline à l'orée de la forêt. Quelques minutes, ou quelques heures, il n'en avait aucune idée. Son monde était uniquement constitué de l'arme stabilisée par le trépied devant lui, et des créatures qui s'élançaient à sa rencontre. Il n'avait plus qu'une seule mission : les empêcher de se précipiter aux trousses des autres survivants, gagner le plus de temps possible pour eux. Rien d'autre ne comptait. Pour la première fois de son existence, André Ladislas Montauban Velázquez était entièrement focalisé sur un seul but, le plus important de toute sa vie. Ce pourquoi il était né, ne pouvait-il s'empêcher de penser, lui qui ne s'était jamais pris pour un fataliste. Alors il ignorait les crampes douloureuses qui élançaient chacun de ses muscles, la raideur de son dos, et le froid qui imprégnait chacune de ses cellules. Il avait presque peur que son doigt frigorifié finisse par geler pour rester accrocher à la gâchette, more et inutile. Mais il ne pouvait pas laisser cela arriver, pas avec tous ceux qui comptaient sur lui.

    Les créatures reprirent leur avancée, toujours plus audacieuses, toujours plus féroces, comme si la mort de leurs compagnes attisaient leur rage. Une fois de plus, Velázquez se força à respirer profondément avant de bloquer ses poumons le temps de viser soigneusement et de tirer à nouveau. Sa cible tomba, fauchée par la balle, mais cette fois-ci toutes ne s'arrêtèrent pas. Deux d'entre elles continuèrent de courir, gravissant la pente en bondissant, propulsées par leurs pattes musclées. Elles bifurquèrent chacune de leur côté, avec la manifeste intention d'attaquer leur proie par les flancs. Velázquez poussa un juron en finissant de recharger son arme, guère optimiste sur les chances qu'il avait de les abattre toutes les deux avant que l'une d'elles de l'atteignent. Il se choisit néanmoins une cible, visa, tira, et ne prit même pas le temps de la voir tomber avant de se tourner pour prendre l'autre en joue. Elle se rapprochait vite, quelques dizaines de mètres les séparaient maintenant l'un de l'autre, et il était encore en train de recharger. Cette fois, il n'y arriverait pas, le monstre était trop rapide, il...

    Il n'en crut pas ses oreilles quand une rafale tonitruante fit écho dans la nuit, et il n'en crut pas ses yeux quand il vit la créature se faire déchiqueter le cou par une pluie de balles. Plus loin, les autres monstres s'arrêtèrent à nouveau dans un conciliabule de sifflements, et Velázquez prit le risque de jeter un coup d’œil derrière lui...

    -Et bien, fit le caporal Samantha Jones alors qu'elle sortait du couvert des arbres, son arme encore fumante. On dirait bien que je suis arrivée à temps.

     

  • Lucie 83

    Et non, je n'ai nullement abandonné "Lucie"! J'ai juste eu besoin de faire autre chose, et de laisser cette histoire de côté pour mieux y revenir. Je ne sais pas encore à quel fréquence je vais continuer, mais j'ai toujours l'intention de terminer cette histoire. Je sais comme tout se finit, reste à y arriver... En attendant, voici donc un nouveau passage!^^

     

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    Les arbres étaient hauts, si hauts que Lucie manquait de se dévisser la tête lorsqu'elle la levait pour contempler leur faîte. Leurs branches couvertes d'épines sombres formaient un toit épais, comme un second ciel qui laissait à peine passer la lueur des étoiles. Les troncs étaient moins impressionnants : fins et élancés, ils avaient un aspect fragile qui rappelait le verre à l'enfant. De temps en temps, de sa main libre -l'autre étant fermement tenue par sa mère- elle effleurait l'écorce froide, presque entièrement lisse, et s'émerveillait d'un tel contact. Malgré le froid, malgré les créatures qui les poursuivaient, malgré tous ces dangers Lucie n'avait pas peur. Elle était triste pour leurs amis qui étaient morts -elle comprenait parfaitement le concept- mais elle ne se sentait toujours pas menacée. A vrai dire, elle se sentait plus en sécurité à la surface qu'elle ne l'avait jamais été dans le train ou même dans les méandres du Complexe. En s'enfonçant ainsi au cœur de cette forêt issue tout droit des légendes, elle ne ressentait aucune inquiétude. Contrairement aux adultes qui l'accompagnaient, elle s'en rendait bien compte.

    Le major Adams ouvrait la marche, son arme brandie devant lui, balayant l'obscurité de sa torche. Ils faisaient avancer le groupe de quelques mètres puis donnait invariablement le signal de s'arrêter ; il prenait alors quelques secondes pour s'assurer que la voie était libre et ils reprenaient leur route. L'officier était le seul d'entre eux à savoir où aller, et il n'hésitait que rarement sur la direction à prendre. Parfois, lors d'un arrêt, il consultait brièvement la boussole de son équipement, et modifiait alors légèrement la direction de leur équipée. Il était à la fois leur guide et leur protecteur, et Lucie pouvait voir que sa mère lui offrait toute sa confiance. Ce qui avait étonné Lucie, parce que Martha Robbins n'avait jamais été aussi prompte à offrir sa confiance à qui que ce soit. Mais elle pouvait comprendre pourquoi : elle aussi, elle se sentait plus rassurée en compagnie du major. Quant à Arthur Kent et Ed Travers, ils faisaient de leur mieux pour suivre le rythme. Comme Lucie et Martha, ils découvraient la surface pour la première fois, et aucun des deux n'étaient rompus à l'exercice physique, surtout dans ces conditions. Kent, notamment, soufflait très fort, et il devait constamment essuyer le givre qui s'étendait sur ses lunettes. Mais l'écrivain ne s'était pas plaint une seule fois, contrairement à Travers dont les grommellement ponctuaient leurs brèves haltes.

    Ils s'arrêtèrent à nouveau, le major ayant levé le point. Ils en profitèrent tous pour souffler, de la buée s'échappant de leurs bouches pour se cristalliser dans l'air ambiant. Rouge d'effort, Lucie n'avait pas froid, pas vraiment. Contrairement aux adultes, qui ne pouvaient pas s'empêcher de trembler et, dans le cas d'Arthur Kent, de claquer des dents. Même le major, dans sa tenue militaire d'extérieur, restait constamment en mouvement, dansant d'un pied sur l'autre pour ne pas se laisser gagner par le froid mordant qui régnait sur Éclat.

    -La direction est toujours bonne, commenta Adams, qui regardait sa boussole. C'est difficile de s'en rendre compte avec tous ces arbres, mais l'abri est par là.

    -C'est encore loin ?

    -Quelques kilomètres. La forêt nous rallonge le chemin, ça nous force à faire des détours. Mais je préfère profiter de son couvert...

    -On vous suit, Canton. Quoi qu'il arrive.

    Martha avait saisi l'avant-bras du major, un sourire encourageant aux lèvres, et ce dernier le lui rendit, reconnaissant.

    -Plus on bouge, moins on devrait avoir froid, en tout cas...énonça Arthur Kent, qui avait croisé les bras sur la poitrine et se les frictionnait vigoureusement.

    -Hey, qu'est-ce que c'est que ça ?

    -Pas maintenant, Travers.

    -Sérieusement major : qu'est-ce que c'est que ça ?

    Adams foudroya Ed Travers du regard, mais consentit à lui accorder son attention. Ce dernier tendait le doigt, désignant là d'où ils venaient. Tout d'abord, le major ne vit rien de particulier, puis il finit par découvrir le phénomène dont parlait le responsable du train : quelque chose s'étendait entre les arbres, une sorte de brume épaisse et blanchâtre qui se déplaçait comme de la fumée. Cela rappelait une sorte de buée glacée s'élevant du sol, serpentant à travers la forêt. Fascinée, Lucie restait bouche bée devant un tel spectacle : les adultes paraissaient inquiets, mais elle trouvait ce brouillard particulièrement beau. En regardant bien, elle pouvait y voir comme d'innombrables cristaux de glace, comme si la neige s'étaient condensée une une brume cotonneuse. Elle tendit une main en avant, nullement apeurée, tandis que les autres se rassemblaient nerveusement en une sorte de cercle. Elle effleura la brume, mais ne ressentir rien de particulier ; elle ôta alors l'un de ses gants, et frôla la manifestation glacée du bout de ses doigts nus. Elle frissonna à son contact, mais bien plus de délice que de froid. Agitant un doigt dans les airs comme un chef d'orchestre sa baguette, elle fit danser le brouillard glacé autour de sa main, et sourit de ravissement. Elle regarda autour d'elle, vit que les adultes étaient toujours en plein conciliabule, et s'enfonça soudain dans le brouillard.