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Lucie 77

Une p'tite page pour commencer la semaine!^^

 

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Le caporal Velázquez atterrit les deux pieds dans la neige, et se mit à courir. Il avait enclenché la lampe fixée sur son arme, et il balayait la nuit autour de lui, tournant sans-cesse la tête d'un côté et de l'autre. Il ne voyait rien d'autre que l'étendue gelée du monde à perte de vue, si ce n'était les formes hautes et sombres d'arbres en rangs serrés. Désorienté par l'immensité de la surface et du ciel au-dessus de sa tête, l'homme était bien incapable de dire à quelle distance se trouvait le bosquet -ou la forêt, pour ce qu'il en savait. Quelques centaines de mètres, un kilomètre ou plus, il ne savait qu'en dire. Le terrain semblait monter petit à petit, et l'orée donnait l'impression de s'avancer au sommet d'une colline. Pour le soldat, cela représentait surtout une possibilité de couvert, et c'était là un objectif rassurant. Il se sentait particulièrement exposé dans ce monde soudainement ouvert, après l'abri du train ; s'il pouvait voir aussi loin autour de lui, nul doute que ce qui pouvait bien rôder à l'extérieur le repérerait aussi ; les repérerait tous. Mais ils n'avaient plus d'autre choix que de s'aventurer dans cet espace gelé. Velázquez ralentit petit à petit et finit par s'arrêter totalement à une cinquantaine de mètres du wagon. Adams l'avait envoyé le premier, en éclaireur ; il en fallait bien un, et ils commençaient sérieusement à être à court de professionnels. La perte de ses camarades était présente comme une plaie à vif dans l'esprit du caporal, même s'il faisait de son mieux pour conserver l'attitude détachée qu'il affectionnait tant. Il lui revenait de faire tout son possible pour assurer la sécurité des passagers maintenant, en compagnie de Jones et Adams. Ils formaient une nouvelle unité à eux tous, rassemblés par les événements qui les avaient précipités dans cette situation périlleuse. Ils ne pouvait plus qu'avancer, et pour le moment le chemin semblait sûr. Du moins, aussi sûr qu'il pouvait l'être dans le froid, la neige et la nuit de ce monde qui leur restait finalement si inconnu. Mais surtout froid, songea Velázquez ; il avait l'impression de souffler un petit nuage de cristaux à chaque fois qu'il expirait, et il se demandait si sa moustache n'avait pas déjà totalement gelé. Il n'était sorti que deux fois à la surface avant cela, en manœuvres avec l'escouade, dans le périmètre de sécurité extérieure du Complexe. Mais dans ces moments là, il avait l'assurance d'avoir son chez-lui non loin, à l'abri dans les profondeurs du monde. Le caporal avait toujours tenu à son petit confort, auquel il avait habitué dès la petite enfance, et il n'avait jamais songé à y renoncer, même après s'être engagé dans les forces de l'Hégémonie. Tout cela lui semblait dérisoire maintenant, et le peu de choses auxquelles il avait jamais accordé de l'importance lui paraissaient de plus en plus lointaines et futiles. Il n'y avait plus que ces gens qui comptaient, ces gens avec qui il traversait cette preuve.

Il regarda une dernière fois l'étendue d’Éclat qui les attendait, puis il se retourna pour observer la massive silhouette du train qui reposait dans le paysage de manière incongrue, comme si le moindre signe d'humanité à la surface n'était qu'une anomalie curieuse et éphémère que ce monde allait s'empresser d'engloutir. La scène était d'autant plus captivante qu'elle était illuminée par les flammes. Un épais nuage de fumée noire s'élevait de la carcasse de métal fondu et tordu qui avait été la salle des machines, avant de se dissiper dans la clarté de cette nuit étoilée. L'incendie provoqué par les charges de Delgado se répandait le long des voitures, rapide et implacable, une traînée rougeoyante et chaude qui filait comme un défi à travers ce décors de neige et de froid. Les flammes léchaient désormais le wagon où les survivants avaient passés ces derniers jours intenses, et Velázquez voyait maintenant avec certitude à quel point ils n'auraient pas pu attendre plus longtemps. Et que grâce aux actions héroïques de Marsters et Grümman, ils avaient pu prétendre à leur fuite éperdue vers la survie. Sans nouvelles du conducteur après l'ouverture des portes, ils n'avaient pu qu'imaginer le pire, et Adams avait finalement donné le signal du départ. Velázquez s'était alors précipité à l'extérieur le premier, vigilant et agile, bravant la température qui traversait chaque couche de sa tenue de combat de surface comme des éclats d'une myriade de petites lames affûtées. Le soldat n'avait vu aucune trace des monstres qui les harcelaient depuis l'incident, et il supposait que l'explosion provoquée par Marsters avait suffi à les attirer, voir même à les effrayer. Il leur serait difficile de se dissimuler dans les alentours, ce qui rassurait Velázquez, mais il ne pouvait s'ôter de l'esprit qu'il s'agissait de leur monde à eux, et il voulait éviter de pêcher par accès de confiance. Aussi, ce ne fut que lorsqu'il fut absolument certain de ne rien voir de dangereux dans les environs qu'il donna le signal convenu en éteignant et rallument trois fois sa lampe. Il vit alors les silhouettes de ses compagnons s'extirper une à une de ce qui n'était plus que la carcasse du train. Elles se découpaient de manière visible, entre le blanc de la neige et le noir du ciel, avançant prudemment, encadrées par Canton Adams et Samantha Jones, armes brandies. Ils étaient sous sortis maintenant, et ils avançaient vers l'éclaireur, laissant derrière eux les dernières heures éprouvantes avec les corps de ceux qui n'avaient pas pu les suivre.

Et puis les flammes s'intensifièrent soudain, montant vers les cieux en une véritable colonne tourbillonnante. De terribles grincements retentir dans la nuit tandis que le métal du train continuait de céder en plusieurs endroits, vaincu par les forces qui le déchiraient, et plus encore par l'âge vénérable de ce qui avait toujours été une véritable institution pour le peuple d’Éclat. Des morceaux d'acier furent projetés un peu partout, et Velázquez pu voir les autres accélérer pour quitter les parages dangereux de ce monde qui s'écroulait derrière eux. Le caporal dut même fermer les yeux pour les préserver de l'éclat des flammes, et lorsqu'il les rouvrit, ce fut pour voir les formes sombres des passagers qui se précipitaient vers lui, dispersées par le chaos ambiant.

Puis il entendit crier.

Commentaires

  • Hiiiiiiiiii! La suite! ^^

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