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Lucie

Aujourd'hui, j'ai fait un truc que je n'avais pas fait depuis trop longtemps: je me suis posé devant Mathurin (c'est le nom de mon ordinateur, parfaitement), et je me suis forcé à écrire une petite heure. Mais ni un article sur une de mes chères séries, ni une note typiquement bloggesque façon journal intime, ni une de mes historiettes accompagnées de leurs petits personnages, ni un post de role-play sur un forum quelconque. Non, je me suis lancé dans une vraie histoire qui n'a aucun rapport avec tout ça, en partant d'une idée qui me trotte dans la tête depuis quelques années. Bon, je le dis tout de suite, c'est surtout histoire de me dérouiller les doigts: à part le concept de base et deux ou trois personnages qui se courent après, je n'ai rien de prévu, pas de cadre, rien. J'ai juste envie d'écrire au fur et à mesure, de prendre du temps chaque jour où je me mets à mon clavier et où je me pousse à écrire, simplement afin de voir ce qui va venir. Et de me laisser porter, juste pour voir ce que ça donne, juste pour retrouver le plaisir d'écrire des histoires. Oh, et de voir si je suis capable de tenir un semblant de rythme ou abandonner après trois jour. Alors j'ai choisi une des trois ou quatre idées qui me trottaient dans la tête depuis très longtemps pour en faire une histoire, et je vais voir ce que ça va donner. Juste comme ça, parce qu'il faut bien (re)commencer quelque part.

Et pour le moment, ça commence comme ça:

 

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Lucie serra plus fort la main de sa mère tandis qu'elle observait, les yeux ronds, le curieux spectacle qu'offrait la Grande Gare. Partout où elle regardait, il y avait une foule de monde qui circulait entre les épais piliers de béton qui soutenaient l'épais plafond arrondi de la station. Contrairement à ceux qui se dressaient dans le quartier étroit d'où venaient la petite fille et sa mère, ces piliers-ci semblaient défier l'usure du temps, c'était à peine si on discernait ici ou là une entaille ou une éraflure. Une troupe d'hommes et de femmes en tenues oranges s'occupaient d'entretenir l'un de ces énormes supports, nettoyant les graffitis à l'aide de serpillières dotées de longs manches. D'autres prenaient pied sur un échafaudage en hauteur, hissés par l'échelle mécanique d'une petites voiture électrique. A une dizaine de mètre au-dessus du sol, ils riaient et échangeaient des plaisanteries sans même regarder en bas, vérifiant avec la nonchalance de l'habitude les harnais à l'air fragile qui assuraient leur sécurité. Nuls traces de peinture à cette hauteur, mais les équipes d'entretien inspectaient régulièrement l'intégrité des piliers. Dix mètre plus haut se trouvait un autre échafaudage semblable au premier, et un dernier surplombait le tout. Lucie manqua se dévisser le cou pour l'apercevoir : elle n'en avait jamais vu d'aussi haut ! Dans son quartier, l'éternel plafond gris était bien plus bas et écrasait de sa masse les petits immeubles d'habitations serrés les uns contre les autres. La place était un luxe qu'on ne pouvait se permettre sous la surface, aussi la sensation d'espace que provoquait la gare donnait à la fillette l'impression d'être soudainement sortie à l'air libre après des années de confinement. 

Mais elle savait qu'il n'en était rien : comme partout ailleurs dans l'Hégémonie, la gare était séparée du monde extérieur par l'épaisseur de son plafond, supporté par ses innombrables pilier. Rien d'étonnant à ce que leur entretien soit pris au sérieux, y compris jusque dans le quartiers d'où venait Lucie et sa mère et ceux, plus sombres et étroits encore, situés au-delà. La présence des ouvriers en orange qui se chargeait de ce travail était une vision des plus commune et, surtout, rassurante. Là d'où Lucie venait, tout le monde respectait la tenue orange et celles et ceux qui la portait ; c'était même un grand honneur pour quiconque d'endosser un jour la fameuse veste et de contribuer à la sécurité de l'Hégémonie, où craindre que le ciel ne tombe sur la tête n'était pas une métaphore. Plus de deux siècles après la fin des travaux titanesques qui avaient été accomplis pour que l'Hégémonie se réfugie sous la surface d'un monde de plus en plus inhospitalier, un seul terrible accident avait suffi pour renforcer cette crainte dans le coeur des gens.Lucie se rappelait parfaitement du jour ou la maîtresse d'histoire leur avait parlé de l'effondrement de la zone sud. Comment les fondations de la structure n'avaient pas supporté la dureté du climat extérieur, comment le froid et la glace s'étaient infiltrés plus profondément que jamais pour fragiliser l'ensemble et comment, il y a cinquante-quatre ans, le plafond s'était en partie effondré, emportant avec lui plusieurs piliers et les deux-tiers de la zone sud. Plusieurs milliers de personnes avaient péri. Ceux qui n'étaient pas morts écrasés par les décombres avaient succombé aux éléments impitoyable de la surface, et ceux qui furent plus tard assez âgés pour se rappeler de l'événement continuent encore de raconter qu'un incroyable vent glacial avait parcouru l'ensemble de l'Hégémonie, s'infiltrant dans la moindre des fissures et faisant frissonner les coeurs. Ce fut la dernière fois que le peuple de l'Hégémonie fut directement confrontée à l'extérieur, à son ciel d'un bleu qui brûlait les yeux, au froid, et aux choses qui en sortaient.

A cette pensée, un délicieux frisson parcourut Lucie ; les choses venues du froid étaient issues des histoires et des rumeurs qui se racontaient sur l'effondrement de la zone sud, et que les gamins adoraient s'échanger entre eux pour se faire peur au coin du vieux radiateur de la cour intérieur de l'école. Les enseignants avaient beau assurer qu'il s'agissait là de racontars sans fondements et d'histoires de vieilles femmes, les enfants se passaient de l'un à l'autre ces histoires de monstres insaisissable venus du froid, qui parcouraient librement la surface de ce monde désolé et croquaient les imprudents qui avaient été assez fou pour sortir un jour. Certains disaient même que plusieurs de ces créatures avaient survécu à l'intérieur de l'Hégémonie, séparées de l'extérieur par l'effondrement, et se dissimulaient maintenant à l'intérieur des murs et des énormes tuyaux venus des égouts qui circulaient un peu partout plus profondément encore dans le sol. Quand elle avait rapporté ces histoire, toute excitée, à sa mère, cette dernière avait souri avant de lui dire d'arrêter de croire à tout ce qu'on pouvait bien lui dire, que ce n'était là qu'une légende urbaine. C'était ce que disaient tous les adultes, ou presque ; parmi les plus vieux, il y en avait toujours pour évoquer l'effondrement et les choses du dehors, un verre de gin industriel entre les mains, accoudés au comptoir du minuscule bistrot toujours bondé, là où la mère de Lucie travaillait tout les soirs après avoir quitté le bureau où elle officiait durant la journée. C'était là-bas que Lucie allait l'attendre après l'école, avant qu'elles ne puissent toutes deux rentrer dans leur petit appartement. Le patron trouvait toujours une place où installer celle qu'il nommait toujours « la gamine » avec un large sourire et lui servait un grog, où le lait chaud et le miel noyaient l'unique goutte de gin que l'homme y glissait avec un clin d'oeil, à la grande satisfaction de Lucie qui pouvait alors s'imaginer boire « comme les grands ». Là, elle faisait ses devoirs sur un coin de table et, surtout, elle écoutait les histoires. Elle faisait si bien partie du décor, et elle était d'un naturel si discret, que personne ne faisait vraiment attention à elle. Elles avaient entendu un groupe d'ouvriers décrire comment Tony avait perdu sa jambe, arrachée par une des machines d'usine et elle avait écouté avec la plus grande attention -fascinée et horrifiée- la manière dont l'os avait été exposé et le sang avait coulé avant qu'ils ne réussissent à lui faire un garrot. Lucie avait été aussi particulièrement intriguée par ce que monsieur Johnson avait commencé à raconter sur les « moeurs frivoles  de la Geneviève de la rue numéro trois » mais sa mère était arrivée avant qu'il n'explique ce en quoi ça consistait ; la mère de Lucie lui avait jeté un regard noir, et il s'était soudainement souvenu de la fillette installée à côté de lui qui buvait ses paroles, installée sur une chaise trop grande pour elle. Il avait trituré son chapeau entre les mains avec un air d'excuse contrit, que la mère de Lucie arrivait à merveille à faire naître chez les autres. Et elle avait refusé d'expliquer à une Lucie déçue en quoi une moeurs pouvait être frivole. Mais ce qui passionnait le plus la fillette, c'étaient les histoires du dehors.

 

Commentaires

  • Je n'ai qu'une chose à dire:
    La suite!!!
    Parce que ça commence vraiment, vraiment, vraiment bien, l'ambiance est juste parfaite et palpable, vraiment.

  • Oh, merci! -^^-

    J'ai réussi à pondre une autre page aujourd'hui, elle va suivre!

  • o/ !!!

  • Voilà qui est fait!^^

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