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Lucie 29

Une petite page aujourd'hui, l'inspiration n'est pas au rendez-vous... Ce sont des choses qui arrivent, et je ne suis pas près de m'arrêter en chemin.^^

 

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Assise enfoncée sur son fauteuil, ses pied se balançant au-dessus du sol, Lucie prenait son mal en patience. A vrai dire, ce n'était pas si difficile que cela : elle observait les adultes qui s'affairaient dans le wagon, suivant telle ou telle conversation jusqu'à ce qu'elle perde un peu de son intérêt. Elle n'avait même pas eu à ouvrir son sac pour en sortir un des ses précieux livres, de ceux qu'elle relisait jusqu'à en abîmer les couvertures et corner les pages. Depuis qu'elle avait commencé à lire, c'était comme si un nouveau monde s'offrait à elle. Sa mère avait été ravie de lu communiquer une passion certaine pour les histoires : Martha Robbins avait beau être d'un pragmatisme inébranlable et garder en permanence les pieds sur terre, elle avait toujours fait en sorte de s'évader dans quelques pages quand elle en avait l'occasion. Dans le petit appartement qu'elles partageaient il y a quelques heures encore, Lucie aimait voir sa mère s'installer dans son fauteuil, les soirs où elle ne travaillait pas au bistrot du quartier. Elle chaussait alors ses lunettes, qu'elle n'aimait pas porter en-dehors de la maison, et elle se mettait à lire. Au début, elle lisait à voix haute pour en faire profiter sa fille, jusqu'à ce que cette dernière fasse des progrès et qu'elle puisse se plonger dans ses propres lectures. Toutes deux avaient sans cesse de nouvelles histoires à découvrir et d'anciennes dans lesquelles se replonger. Elles n'étaient peut-être pas très riches du tout, mais la lecture était un loisir qui ne coûtait pas cher au sein de l'Hégémonie. C'était sans-doute la distraction la plus répandue et la plus facile d'accès, au côté des écrans qui diffusaient leurs programmes variés. Sous terre, séparés de la surface par des tonnes de béton, de roche et de terre, il fallait bien trouver de quoi s'occuper une fois son travail terminé. La vie était dure dans l'Hégémonie, mais rarement ingrate.

 

Avec intérêt, Lucie contemplait maintenant Arthur Kent. L'homme s'était installé un peu à l'écart, sans doute pour profiter du plus de calme possible. Penché au-dessus de l'épais carnet qu'il avait sorti de sa précieuse sacoche, l'écrivain faisait son office, une plume dans la main. Il n'avait pas dit grand chose depuis qu'il était revenu en compagnie de Martha, Kenneth et des soldats de l'escouade. Il avait troqué son air distrait pour un air un peu maussade. Il ne levait les yeux de ses pages que pour regarder brièvement Martha ou le major Adams, avant de se replonger dans son œuvre. Lucie était curieuse de savoir ce qu'il pouvait bien être en train d'écrire, mais elle n'osait pas le déranger. Il semblait différent, ainsi concentré, dans son petit monde. Il avait l'air plus concentré, plus adroit, plus...intense. Il n'était pas comme l'homme perpétuellement étonné qui semait ses affaires un peu partout quand il courait pour attraper son train. Quelque part, il faisait maintenant à Lucie un peu la même impression que les soldats. Il était pourtant très différent d'eux sur tous les points ou presque, mais ils partageaient ce même dévouement à leur cause, qui se sentait dans chacun des actes qu'ils accomplissaient dans leur domaine. Il suffisait de voir avec quelle diligence et compassion le soldat Jung allait régulièrement s'assurer de l'état de madame Miguel, ou le soin que prenait le soldat Ravert à vérifier une à une les fréquences de sa grosse radio ou à passer en revue les divers systèmes du wagon. Les deux hommes semblaient puiser leurs forces l'un de l'autre, et ils ne manquaient jamais l'occasion d'échanger une courte plaisanterie ou un mot d'encouragement suivi d'une tape sur l'épaule. Ils formait un véritable binôme, de la même manière que les caporaux Jones et Velázquez. Ce dernier était occupé à distribuer des cartes, installé nonchalamment -comme à son habitude- en compagnie de Kenneth Marsters, du père Horst et d'Augustus Miguel, que Sungmin Jung avait convaincu d'essayer de se changer un peu les idées. Le grand blond s'était mêlé avec aisance aux passagers, comme si son uniforme n'était qu'une seconde peau dont il pouvait se défaire avec aisance. Il s'était tout de suite bien entendu avec John Horst, tous deux partageant une sorte de don pour mettre les autres à l'aise. Outre Arthur plongé dans son travail, il n'y avait que le père Delgado pour rester à l'écart, mais personne ne semblait s'en formaliser. Il ne se montrait pas désagréable, seulement peu accessible. Il se contentait d'ignorer les autres, qui le lui rendaient bien. Lucie se demandait bien ce qui pouvait lui passer par la tête, d'autant qu'il lui avait paru étonnamment sympathique quand ils s'était croisés plus loin dans le train un peu avant le choc, comme s'il y avait chez lui quelque chose de caché derrière une surface des plus distantes, quelque chose qui pouvait avoir un peu de mal à sortir mais qui le rendait plus doux, quelque part. D'autant qu'elle ne savait toujours pas qu'il s'agissait de l'homme qui avait verrouillé la porte derrière elle.

 

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