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Lucie 39

Une petite page aujourd'hui.

 

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-Tu m'étonnes...

 

Paul Ravert était appuyé sur la crosse de son fusil comme sur une béquille, et paraissait aussi secoué que les autres. De voir ce grand gaillard d'habitude si tranquille dans cet état semblait si étrange à Velázquez qu'il se demandait s'il n'était pas en train de rêver. Mais si c'était le cas, il ne se réveilla pas. A la place, il pouvait entendre son cœur cogner si fort dans sa poitrine qu'il en avait presque mal, et il commençait seulement à calmer sa respiration.

 

-Le major dit de nous grouiller, reprit Ravert. Apparemment, Travers est déjà là-bas.

 

-Ne perdons pas de temps alors... Kenny, ça va?

 

A genoux, un bras à terre, l'ingénieur n'avait dit aucun mot depuis qu'ils s'étaient tous réfugiés derrière la porte. Son autre main était cramponnée sur le pistolet, et Velázquez dut gentiment le lui ôter des doigts pour que l'homme finisse par reprendre ses esprits. Il était pâle comme un linge, les cheveux défaits, et il cligna plusieurs fois des yeux, encore un peu hagard. Il voulut inspirer profondément et fut secoué d'une quinte de toux : chaque respiration lui faisait mal, et il frôla la balafre qui zébrait sa poitrine avec une grimace de douleur. Inquiet, le caporal lui mit une main sur l'épaule dans l'espoir de le réconforter :

 

-Ne vous inquiétez pas mon vieux, Sungmin va vous arranger ça. Ce n'est qu'une égratignure.

 

-Génial, grogna le blessé. Une putain d'égratignure alors...

 

Mais il reprenait déjà des couleurs au fur et à mesure qu'il recouvrait toute la force de son esprit, et il finit par être assez fort pour se relever avec l'aide du caporal.

 

-Tenez, vous le rendrez vous même au major. Vous n'avez pas menti quand vous aviez dit savoir vous en servir, j'en suis heureux.

 

-Viser et tirer : rien de bien compliqué...dit l'ingénieur en acceptant le pistolet. Du moins c'est ce que je me disais avant de me retrouver propulsé en combat réel. Ça change tout, croyez moi. Et c'est devenu un coup de chance. J'aurais tout aussi bien pu vous tirer dessus par erreur, dans l'état où j'étais.

 

-Fantastique. Voilà qui est rassurant.

 

Les deux hommes échangèrent un sourire, et le caporal tendit sa main à Marsters, qui l'accepta non sans une certaine surprise.

 

-Merci Kenneth. Vous savez, pour m'avoir sauvé la vie, tout ça.

 

-Oh. De rien. Et dire que je croyais que c'était vous le soldat !

 

-Ah bon, j'en ai l'air ? Diantre ! Vous allez pouvoir marcher ?

 

-Oui, ne vous inquiétez pas. Inquiétez-vous plutôt de ces bestioles...

 

-La porte est solide, et je doute qu'ils sachent l'ouvrir. Mais un peu plus, et elles se répandaient dans tout le train. Ces saloperies ont dû entrer par le sas, je ne vois que ça. Stuart n'a eu aucune chance.

 

-Je suis désolé pour votre ami.

 

-Il serait erroné de dire que c'était mon ami. Pour être franc, je le tenais plutôt pour une petite ordure vicieuse, et il me tenait sans doute pour un connard pompeux. Mais il faisait partie de l'escouade, c'est ce qui compte.

 

Les trois hommes s'étaient remis en route depuis quelques minutes maintenant, et Marsters avançait en clopinant, le souffle court. Il s'arrêtait régulièrement pour reprendre le dessus sur la douleur qui déchirait son torse, sous le regard inquiet des deux soldats.

 

-Je n'avais jamais entendu parlé de telles créatures, souffla l'ingénieur durant l'une de ces pauses. Mais personne ne sait vraiment tout ce qui peut se terrer à la surface...

 

-Ce que je me demande, moi, c'est comment ce sas s'est retrouvé ouvert.

 

-L'apprenti du conducteur peut-être ? Grümman nous avait dit qu'il était sorti par l'un de ces machins, il a peut-être été attaqué, n'a pas pas pu refermer derrière lui...

 

-Pauvre gosse...

 

-Ou alors c'est votre collègue...

 

-Stuart ? Je ne vois pas pourquoi. Même si rien ne m'étonnerait de sa part.

 

-C'est bon, on peut reprendre.

 

Marsters s'appuya sur l'épaule que lui offrait Velázquez, et ils reprirent leur marche en direction du wagon des passagers.

 

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