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Du café dans la cuisine

Un bref texte d'humeur, pondu sur le moment.

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Il y a des choses qui ne changent pas. Les saisons, par exemple. Elles ne peuvent pas s'empêcher de revenir, encore et encore. D'accord, vous avez généralement en horreur ceux qui se plaignent du temps qu'il fait -nom d'une chouette, on n'y peut rien, alors à quoi bon pousser des hauts cris pour quelques gouttes de pluie de trop ou un rayon de soleil malvenu?- mais il y a quelque chose dans le printemps qui vous pousse à vouloir vous enterrer au fond d'un trou pour n'en ressortir que sous un ciel gris, froid et humide. Vous haïssez le printemps. Il y a de ces gens qui n'ont qu'une envie : hiverner tandis que règnent la neige et le froid. Vous, vous voudriez printempiner (ça a l'air vulgaire, dit comme ça). En fait, vous n'êtes pas un grand fan de l'été qui suit inévitablement non plus : la belle saison ne vous a jamais vraiment réussi. Il y a quelque chose dans la chaleur et le beau temps qui a une fâcheuse tendance à déstabiliser votre moral vacillant. La prédisposition à la déprime et à la morosité s'épanouit au soleil comme le tournesol vigoureux (tiens, ça aussi, ça a l'air vulgaire). Vous êtes un enfant de l'hiver, un être qui se complet dans la fraîcheur, le ciel gris et la neige. Déjà, vous avez toujours trouvé plus facile -et tellement plus agréable- de vous réchauffer quand il fait froid : vous enrouler dans une couverture, refermer votre veste, vous planquer sous draps et duvets bien frais juste dans le seul et unique but d'en frisonner de bonheur avant de sentir doucement la chaleur vous gagner. Tandis que se rafraîchir quand on a trop chaud, c'est tout de suite plus fastidieux. Après tout, au bout d'un moment il n'y a plus de couche à ôter, alors qu'on peut toujours en rajouter une quand la température est fraîche ! Et franchement, une boisson fraîche quand il fait chaud, c'est pas mal, mais une boisson chaude quand il fait frais, c'est le nirvana ! Et puis outre la chaleur printanière qui monte, qui monte, qui monte (décidément!), il y aussi le retour de vos chères allergies, condamnées par l’écœurante libido exacerbée du monde végétal. A ce que je sais, personne ne va répandre sa semence partout sur les fleurs (ou alors, des gens vraiment particuliers, mais j'imagine qu'il en faut pour tous les goûts), alors qu'elles nous foutent la paix !

Bref, le printemps, ça vous mine, ça vous abat, ça vous déprime. Vous vous retrouvez confronté à un monde qui bourgeonne, préambule de l'été actif de la fourmi ouvrière, et il n'y a pas assez de clichés métaphoriques dans le multivers pour souligner à quel point cela vous fiche le moral en berne. Vous êtes réglé comme du papier à musique, chaque année c'est la même chose ! Enfin bon, pour être parfaitement honnête, il y a eu le printemps puis l'été passé, qui ont réussi à vous faire douter de leur malédiction coutumière. Mais cette année-ci, vous n'y couperez pas, et vous allez payer double-dose, vous le sentez ! Cela vous apprendra, à vous croire sorti d'affaire. Il y a peu de choses pires que de goûter à un fruit autrefois défendu et délicieux pour réaliser qu'il est en réalité aussi pourri qu'un cœur de percepteur. Il ne vous reste qu'à mâcher tout ça, morceau par morceau, et à prendre votre mal en patience. Le printemps, puis l'été, et leur insupportable sursaut de vie et d'activités, de symphonie de laquelle vous vous sentez inexplicablement exclu, rempli de mirages auxquels vous vous laissez bêtement prendre à chaque fois. Peut-être que ce coup-ci, cela se passera bien, peut-être que vous saurez en profiter, peut-être qu'il va enfin se passer ce petit quelque chose électrique que vous pouvez sentir dans l'air sans jamais réussir à le saisir. Ou peut-être que ça ne se passe qu'une seule fois et dans ce cas, vous êtes bien marron (même si pour ça, il faut attendre l'automne).

Ces quelques mots pour simplement dire ceci : vous n'aimez pas le printemps, et vous avez peur que ce ne soit que la colline à dégringoler d'ici. La convention annuelle de jeu de rôles qui marque chaque année pour vous le début de cette saison honnie est déjà passée, et avec elle ce bref rush de désinhibition et de pur bonheur. Maintenant, vous êtes en manque, la soupape à sauté, il ne reste qu'à passer l'été sans se dessécher. Au final, rien ne change. Vous y avez bêtement cru l'espace de quelques mois ensoleillé, mais vous vous êtes fait avoir. La leçon est retenue, il n'y a plus rien à voir. Il ne vous reste qu'à aller vous coucher, passer une nuit de plus, à mal dormir, parce que vous n'avez jamais aussi bien dormi depuis.

Enfin si, il y a une chose, sans-doute celle qui n'aura pu que contribuer à vous faire entrer de plein pied dans ce nouveau printemps déprimant, une chose qui ne cessera sans-doute jamais de vous hanter, une chose qui représente ce que vous avez perdu, et qui signifie sans-doute bien plus qu'elle ne devrait signifier mais peu importe, c'est votre petite chose, votre petit rappel : vous avez ouvert un placard, et il y a du café dans votre cuisine...

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