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Lucie 74

Le passage du jeudi!^^

 

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-Je suis désolé...

La voix de Jung Sungmin était faible, et le soldat luttait pour prononcer chaque mot. Couché sur une banquette, il était devenu bien pâle, presque cadavérique. Assise en face de lui, Martha Robbins pressait des chiffons imbibés de sang sur sa blessure. Guidé par les faibles indications du médecin, John Horst lui avait fait une injection d'antidouleurs, pris dans son matériel. C'était là tout ce qu'ils avaient pu faire.

-Chut, ne dites rien. Vous n'avez rien fait de mal, Sungmin.

Martha se fendit de son sourire le plus rassurant malgré sa peine, comme lorsque sa fille était malade et qu'elle faisait tout pour qu'elle se sente mieux. En songeant à Lucie, elle se demandait sans arrêt à quel point la situation pouvait l'affecter. Sungmin s'était occupé d'elle lorsqu'elle avait été blessée lors de l'incident, et la fillette appréciait beaucoup le jeune médecin, comme eux tous. Et puis il y avait la conduite de monsieur Miguel et son suicide... Les soldats avaient installés son corps auprès de celui de sa femme, et l'avaient recouvert d'une couverture, sans mot dire. Les deux époux étaient à nouveau réunis, mais à quel prix... Mais Lucie n'avait visiblement pas été plus effrayée que cela. L'enfant prenait sur elle-même, sa mère pouvait le sentir, mais elle faisait preuve d'une résistance que Martha commençait presque à trouver inquiétante. Pour le moment, Lucie avait été confiée à Arthur Kent, qui continuait de parler à Marsters via sa radio.

-Elle s'en sortira, elle est forte...

Jung avait suivi le regard de Martha. La femme changea légèrement de position pour mieux ajuster sa prise sur la blessure, réussissant à conserver son sourire.

-Je sais. Merci encore, pour vous être occupé d'elle.

Lucie avait tenu à venir voir Sungmin, sans faire preuve de la moindre crainte. Elle s'était montrée si confiante que le médecin en avait été curieusement soulagé. Elle avait déposé un baiser sur sa joue, avant de le laisser au soin des adultes.

-Je suis vraiment désolé, major...répéta le moribond.

-Vous n'avez pas à l'être. Vous avez fait votre devoir.

Canton Adams n'avait pas quitté le chevet de son soldat. Il n'avait pas pu être aux côtés de Paul Ravert, ni même de Stuart Moore, mais il était là pour Sungmin. L'officier était très affecté, Martha le connaissait assez pour le deviner. Jones et Velázquez étaient là eux aussi, auprès de leur ami, de même que le père Horst.

-Tiens le coup, mon vieux, renchérit Velázquez.

-Vous allez...me manquer...

La respiration du soldat était de plus en plus difficile. Il bougea faiblement sa main, et elle rencontra celle du major, qui la serra avec émotion. Plus personne ne parlait, si ce n'était Kent, à l'autre bout du wagon, occupé à accompagner Marsters dans sa tâche. Jung poussa un grognement, du sang coula à travers les chiffons, mais Martha ne prit pas la peine de les changer à nouveau ; cela ne servait plus à rien.

-N'en voulez pas...à Augustus... Il ne voulait...il ne voulait pas être seul. Comme moi...

-Personne n'en veut à personne. Adams mentait, mais apaiser les derniers instants de son soldat était tout ce qui comptait, maintenant. Il serra plus fort la main de Sungmin.

-Paul... La voix du blessé n'était plus qu'un murmure. Paul, je suis là...

Et puis, plus rien. Dans sa main, le major sentit celle du soldat se relâcher. Jung Sungmin était mort.

-Merde !

Adams flanqua un coup rageur contre le dossier d'un siège, et Velázquez serra brièvement Jones dans ses bras. Et pendant que John Horst fermait les yeux du mort, Martha luttait pour retenir ses larmes. Elle sentit quelqu'un lui tirer la manche et elle prit sa fille dans ses bras. Aucune d'eux ne prononça le moindre mot.

-Merde, répéta le major, et il parut soudain très fragile, et très seul. Sa radio se mit à grésiller. Il prit quelques secondes pour se recomposer avant de l'enclencher :

-Adams.

-Grümman. Je voulais vous dire que j'étais prêt à ouvrir les portes, j'ai les commandes en main.

-Nous avons perdu le soldat Jung.

-Je...Je suis désolé, major.

-Merci, capitaine Grümman.

-Major, le... le feu progresse. Vous n'avez plus beaucoup de temps.

Ponctuant leur conversation, on entendait les bruits sourds résultant des créatures qui continuaient de se jeter régulièrement contre les cloisons. A croire qu'elles essayaient volontairement d'user le moral de leurs proies.

-Reste à espérer que le plan de Marsters marchera, finit par répondre le major. Sortir pour se jeter dans la gueule du loup ne servira à rien.

-Rester ici et brûler non plus.

-Je sais, capitaine. Si on devait en arriver là, nous sortirons et nous nous battrons plutôt que de rester pris au piège. Je vais demander à tout le monde de se préparer pour la sortie. Vous nous rejoindrez après avoir ouvert les portes.

-Je...je ferai de mon mieux, major.

-J'y compte bien, je tiens à vous serrer la main !

-Ce serait bien, major... Ce serait bien. J'attends sur Marsters, et je me tiens prêt. Grümman, terminé.

Canton Adams ferma sa radio, ferma les yeux et prit une profonde inspiration avant de se masser les tempes. Puis il sentit la main de Martha sur son épaule, et ce simple contact lui permit de s'éclaircir l'esprit. Il la regarda, avec sa fille, et il reprit courage.

-Merci, dit-il, tout simplement.

-De rien.

Puis il se dirigea vers Arthur Kent, et lui fit signe de lui passer sa radio :

-Où en êtes-vous, monsieur Marsters ?

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