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  • Lucie 58

    Pas de notes ces deux derniers jours, une sournoise appendicite s'étant mise en travers de mon chemin. Mais maintenant que je suis de retour à la maison, il serait sot de laisser le rythme se casse plus longtemps! Une petite page donc, histoire de faire repartir la machine!^^

     

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    « Journal d'Arthur Kent, deuxième jour

     

     

    ...d'après ce qu'Adams et Grümman nous on raconté. Le major et ses hommes n'ont pas l'air alarmé plus que ça, mais je ne sais pas jusqu'à quel point ils affichent pour nous une façade tranquille, cachant leur inquiétude. Il est vrai que nous ne risquons sans doute pas grand chose, à l'abri dans notre wagon, mais il n'y a rien de rassurant à entendre ces bestioles se jeter contre notre refuge. Leurs tentatives sont moins fréquentes, on dirait, mais ils s'y remettent toujours au moment où l'on s'y attend le moins. C'est presque comme s'ils n'y croient pas vraiment, mais qu'ils continuent uniquement pour assurer le spectacle. Pour que nous n'oublions pas leur présence. Et ça marche. Leur manège commence à porter sur les nerfs de chacun d'entre nous. Il suffit de voir comme nous sursautons au moindre choc. Travers surtout semble en permanence sur le point de craquer, et il n'arrête de faire les cents pas dans le couloir que pour tordre nerveusement sa casquette de fonction entre ses mains, devant la vitre, comme s'il essayait de de déceler une issue miraculeuse au-delà du verre teint. Mais malgré la tension, j'ai l'impression que nous tenons le coup aussi bien que possible, étant donné les circonstances. La peur est bien présente, et l'attente difficile, mais nous ne succombons pas à la panique. Pour l'instant. Impossible de savoir combien de temps encore nous serons capables de garder ce rythme. J'imagine que tant que nous aurons le support du chauffage, et assez de nourriture dans les réserves, nous pourrons prendre sur nous. Mais le garde-manger n'est de loin pas inépuisable, de même que l'énergie qui circule encore dans les circuits. Le train est vieux, et nullement équipé pour ce genre d'aventure. Grümman semble le plus touché par ce point. Il a beau avoir déjà été bloqué à la surface aux commandes de l'engin, mais jamais autant de temps. Et jamais dans de telles circonstances. Il a des allures de père inquiet pour son enfant, et passe le plus clair de son temps dans la voiture de tête. Il est presque impossible de l'en déloger, et nous ne le voyons pas beaucoup.

     

    Inquiétantes sont aussi les possibilités de troubles en Haven. L'absence de secours ou de communications renforce nos craintes à ce sujet et apporte plus de poids aux dires de Delgado. Et le major a avoué que la situation était plus difficile que l'Hégémonie l'avouait publiquement, même s'il n'est pas entré dans les détails. J'en ai beaucoup parlé avec Kenneth, et il est au moins aussi troublé que moi à ce sujet, si ce n'est plus. Il dit que cela en met en lumière certaines des raisons pourquoi il a été appelé à Haven, notamment concernant ses compétences en ingénierie. Les choses sont sur le point de changer, plus rapidement qu'on ne le croit, et l'Hégémonie elle-même semble prise de vitesse par tous ces développements. C'est à se demander si la situation dont nous sommes les victimes n'était pas quelque part inévitable. Et bien évidemment, il a fallu que ça tombe sur le trajet où je me trouve. On essaie de fuir quelque chose, et on se retrouve jusqu'au cou dans des ennuis pires encore. Enfin, je dramatise, nous ne sommes pas encore morts. Même si la perspective d'un danger aussi final s'impose de plus en plus à nous : Detroit, Moore, la pauvre madame Miguel... Quelque part, c'est son état qui m'effraie le plus. Se faire dévorer par des reptiles géants sortis des glaces représente au moins une fin concrète, compréhensible, tandis que le mal qui s'est emparé de notre doyenne est quelque chose dont nous ne connaissons pas la cause. Sungmin est bien incapable, avec son matériel limité, de dire s'il est né de sa blessure à la jambe ou d'autre chose. Ni si le mal est contagieux. Quoi qu'il en soit, son agonie s'éternise, et Sungmin fait tout ce qu'il peut pour diminuer ses souffrances, même si elle ne semble plus se rendre compte de rien.

     

    Au final, pour le sort de cette femme comme pour le nôtre, nous n'avons plus qu'à attendre. Attendre, et espérer qu'un événement aussi improbable que celui qui nous a précipité dans cette galère finisse par se produire pour nous en sortir. J'ai l'impression que c'est là notre seul espoir d'échapper au froid, aux créatures qui rôdent, aux maux qui nous rongent et aux rêves terribles de Diego Delgado. »

     

     

     

  • Lucie 57

    Et une page de plus! ^^

     

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    Effectivement, c'est...inquiétant.

     

    Dans la voiture de tête, Canton Adams étaient penché par-dessus l'épaule de Daniel Grümman pour mieux voir ce que diffusait le petit écran de surveillance. On pouvait y voir la surface d’Éclat, ou du moins les contours qu'on devinait dans la blancheur du jour et de la neige, là où le train étendait son ombre. Et dans ce décors battu par les vents, plusieurs silhouettes filaient régulièrement, bondissantes. Il s'agissait des mêmes espèces de gros lézards bipèdes qui avaient pénétré dans une partie du train et tué Stuart Moore ainsi que, probablement, Stan Detroit. Par groupe de trois ou quatre, elles rôdaient en bande, agitant la tête de tous les côtés comme des oiseaux. Ils rappelaient à Adams de gros poulets, comme ceux que ses parents élevaient dans l'une des fermes de production du Domaine. Mais en bien, bien plus dangereux.

     

    -Il y a quelques caméras extérieures comme celles-ci installées le long du train. Je ne sais pas trop quel était leur but à l'origine, et elles sont loin de toutes fonctionner, mais j'y jette régulièrement un œil depuis qu'on est bloqués. Et toutes celles qui marchent captent des images de ces saletés depuis tout à l'heure. C'est comme si elles se rassemblaient, j'en ai compté plusieurs dizaines.Ce sont elles qui se projettent contre les voitures.

     

    -Vous avez eu raison de me montrer tout cela dès que possible, capitaine Grümman. J'aime à savoir ce qui se passe. Mais nous devrions être à l'abri tant que nous restons à l'intérieur. Ce n'est pas comme si elles pouvaient dévorer le métal pour nous atteindre.

     

    -Seulement, on risque de se retrouver à court de nourriture avant elles, grogna le chef conducteur.

     

    -On avisera à ce moment là.

     

    -Vous ne parlez plus des secours ?

     

    -Ils devraient être là, à l'heure qu'il est. Ou ils auraient au moins réussi à nous contacter. Non, il y a quelque chose qui cloche de ce côté aussi. Ce qu'a dit Delgado m'inquiète, dieu sait ce que peuvent tramer ses responsables.

     

    -Vous le croyez ?

     

    -Disons que les troubles sont plus proches de la surface qu'on ne le pense, ces temps-ci. Il n'est pas de mon ressort d'en dire plus que nécessaire, mais l'Hégémonie est inquiète. Tout se joue à Haven, c'est pourquoi mon escouade y a été envoyée, pour rejoindre nos forces là-bas.

     

    -Pour lutter contre l'invasion des lézards géants ?

     

    -On ne m'a jamais parlé de lézards géants dans les rapports, je peux vous l'assurer. Ce sont les lézards du genre de Delgado qui m'inquiètent le plus. Ceux qui sont cachés sous la surface. Mais je doute qu'il en sache plus que nécessaire, lui aussi. Ces gens fonctionnent de manière prudente.

     

    -Qu'est-ce que vous allez dire aux passagers ?

     

    -La vérité. Ça ne sert à rien de les maintenir dans le noir, d'autant qu'ils ne sont pas stupides. On pourrait difficilement plus les affoler. Ils tiennent remarquablement bien le coup, d'ailleurs. Et vous aussi, capitaine.

     

    -Je fais de mon mieux. Et je n'aurais jamais imaginé qu'on m'appellerait à nouveau par mon grade un jour.

     

    -Et qu'est-ce que ça vous fait ?

     

    -Plus de bien que je ne l'aurais cru. Seulement...

     

    -Je suis désolé, pour votre jeune ami.

     

    -Il y a peu de chances pour qu'il soit à l'abri quelque part, hein ? Non, ne dites rien, je le sais bien.

     

    Les deux hommes se turent, aucun autre mot n'étant nécessaire. Ils continuèrent de regarder l'écran, le visage sinistre. Ils avaient beau être à l'abri dans les wagons fermés, il y avait quelque chose d'effrayant dans la manière dont se déplaçaient les créatures. De temps en temps, l'une d'elles s'arrêtait devant la caméra et levait la tête, la fixant avec une intensité que Canton Adams et Daniel Grümman n'avait jamais vu chez un autre animal. Une intensité qui faisait froid dans le dos.

     

    -Bon, je vais aller avertir les autres, finit par dire le major en tapotant l'épaule de Grümman. Qu'on se prépare à une fin de journée et à une nouvelle nuit plutôt...difficile. En espérant que ce soit la dernière.

     

    -Oui, en espérant...souffla le conducteur une fois qu'Adams fut sorti. Mais son instinct continuait de lui souffler le contraire et, au fond de ses os, Daniel Grümman avait l'impression résignée que le pire ne faisait en réalité que commencer.

     

  • Lucie 56

    Une page pour commencer la semaine!^^

     

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    Adams la retint quelques instants encore, l'air un peu inquiet. Il ne savait pas trop si elle avait réellement calmé ses ardeurs, ou si la colère était prête à refaire surface. Quant à Delgado, il n'avait même pas poussé un cri quand elle l'avait frappé et n'avait rien dit ensuite. Il se contentait de les regarder en silence, sans la moindre réaction. Il donnait l'impression d'être sous le coup d'une attente, ou d'une profonde réflexion. Mais Martha ne lui accordait plus aucune attention, et le major finit par la lâcher. La femme chercha le regard du militaire, et c'était elle qui le retenait, maintenant, et ce sans même le toucher.

     

    -Qu'y a-t-il, Canton, vous avez eu peur que j'aille trop loin avec notre saboteur ?

     

    -Et bien, j'avais rarement vu quelqu'un d'autant en colère. La seule personne capable d'enrager autant que je connaisse, c'était mon vieux major d'instruction, le major Pinchalov. Et encore, j'aurais envie de dire qu'il me faisait moins peur.

     

    -Ne jamais sous-estimer la colère d'une mère. Mais notre prisonnier n'a rien à craindre de moi. Et ce n'était pas moi qui était prêt à l'abattre, tout à l'heure, quand il a perdu la tête. Je vous ai vu sortir votre arme.

     

    -Seulement en cas de dernier recours.

     

    Elle ne répondit rien et ils restèrent là, comme s'ils se jaugeaient à nouveau, chacun essayant de savoir jusqu'où l'autre était capable d'aller. Sans doute auraient-ils pu rester ainsi encore longtemps, le reste du wagon semblant avoir disparu à leurs yeux, si Lucie n'était pas venue rejoindre sa mère. Elle tira le poignet de Martha pour attirer son attention, et réussit à rompre le charme :

     

    -Maman ?

     

    -Ça va ma chérie. Et ne t'inquiète pas, tu ne risques rien. Le major a la situation en mains, n'est-ce pas major ?

     

    -On fait ce qu'on peut. Puis, après un coup d’œil sévère de la part de Martha, il se reprit avec un raclement de gorge gêné, presque malgré lui. Je veux dire bien sûr. Que j'ai la situation en mains. Au poil, même. Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait ajouté cela, et il était sûr que le major Pinchalov n'aurait pas approuvé. Il salua les Robbins de deux doigts portés à sa tempe, et il alla retrouver Delgado en compagnie de Horst.

     

    -Je ne m'inquiète pas, dit Lucie, souriant à sa mère pour la rassurer. Je ne me suis pas vraiment fait mal quand le train s'est arrêté, et puis les soldats sont là pour nous protéger maintenant. Comme depuis qu'ils m'ont trouvée. Et monsieur Delgado ne me fait pas peur.

     

    -Tu es courageuse, comme toujours.

     

    -Parce que tu l'es plus que moi. Mais je ne dis pas tout ça pour te rassurer. Il ne me fait pas peur, parce que les rêves sont pires. Enfin, je ne sais pas vraiment s'ils sont pires, mais ils sont plus dangereux. Plus réels, aussi.

     

    Martha ne regarda pas sa fille avec un air incrédule, pas plus qu'elle n'essaya de la rassurer. Sa fille rêvait depuis longtemps -depuis toujours, il lui semblait- de telles choses, et si elle n'avait jamais pu comprendre ce phénomène jusqu'à aujourd'hui, elle lui avait toujours accordé un certain crédit. Parce que c'était sa fille, et qu'elle ne pouvait pas plus la mettre en doute qu'elle ne pouvait arrêter de respirer. Seulement, elle n'aurait jamais imaginé que la situation prendrait une telle tournure qu'elle franchirait la dernière barrière qui séparait ces rêves étranges de la réalité. Martha en avait peur, plus que jamais, parce c'était là une chose contre laquelle elle ne savait pas comment protéger sa fille.

     

    -Maman ?

     

    La voix de la fillette était à présent plus insistante, et l'instinct de Martha lui souffla que les ennuis ne faisaient en réalité que commencer.

     

    -Qu'est-ce qu'il y a, ma chérie ?

     

    -Je crois qu'on va encore avoir des ennuis. Enfin, plus que maintenant. Le bleu...

     

    -...le bleue arrive. C'est son territoire, ici, à la surface que nous sommes tous fous de braver, intervint Diego Delgado d'une voix plus forte. Il donnait l'impression d'hésiter entre afficher un sourire satisfait et une grimace craintive. Et avant que John Horst n'ouvre la bouche pour lui demander une explication, des coups sourds retentirent contre la cloison. Du siège où il s'était installé, Ed Travers bondit soudain :

     

    -J'ai senti quelque chose se jeter contre le wagon ! Je l'ai senti, je vous dis !

     

    -Major!lança Paul Ravert, la radio à la main. C'est Grümman. Il y a un problème, dehors.