Histoire de continuer mon petit tour des séries estivales, je me suis dit que j'allais aussi parler de « Alphas ». L'été étant une période tranquille, je crois que j'en aurai bientôt fait le tour. « Falling Skies » a terminé sa deuxième saison la semaine passée avec les honneurs, « Grimm » continue de trouver le rythme qui lui convient et après « Alphas », il ne restera plus que « Warehouse 13 » à présenter. Et oui, je sais bien que la fin de l'été, c'est aussi « Breaking Bad » qui continue et oui, je sais bien que je devrai m'y mettre un jour, mais je ne peux pas tout voir...
C'est quoi ?
« Alphas » est une série américaine de genre fantastique dont la première saison de dix épisodes fut diffusée en été 2011 et dont la seconde est actuellement en cours. Le concept est le suivant : des individus -nommés Alphas- ont évolué de manière à posséder certains dons surhumains, allant d'une force accrue à des sens sur-développés. La série suit les aventures d'un petit groupe d'Alphas rassemblés et dirigés par un humain spécialiste de leur condition, le docteur Rosen. Ce dernier s'efforce d'aider les alphas à trouver leur place dans ce monde tout en travaillant plus ou moins difficilement avec le gouvernement dans le but d'appréhender des alphas dangereux pour la société.
C'est qui ?
A défaut d'un personnage réellement principal - « Alphas » étant une véritable série d'ensemble- on peut néanmoins y trouver un personnage charnière maintenant la cohésion du groupe, à savoir le docteur Lee Rosen (joué par l'excellent David Strathairn). Ce savant vieillissant est un humain tout ce qu'il y a de plus normal qui a voué sa vie à l'étude et à la compréhension du phénomène alpha. Il ait office de psychiatre et de conseiller pour les membres de son équipe, et fait la liaison entre eux et le gouvernement, faisant son possible pour conserver ce fragile équilibre qui menace à tout instant de s'écrouler. Il a rassemblé une équipe d'aphas dans le but de les aider à s'intégrer mais aussi de se servir de leurs pouvoirs pour arrêter des alphas dangereux. Bill Harken (Malik Yoba) est un ancien agent du FBI grognon et prompt à l'anxiété, capable d'augmenter sa force et son endurance au prix d'un stress physique intense. Gary Bell (Ryan Cartwright) est un jeune homme souffrant d'autisme capable de lire et d'agir sur n'importe quel type de signal de communication sans fil. Nina Theroux (Laura Mennell) possède sans doute le don le plus redoutable de l'équipe, à savoir celui de pouvoir pousser n'importe qui à faire ce qu'elle leur ordonne ; un pouvoir source chez elle de bien d'abus et de traumatismes. Cameron Hicks (Warren Christie) est un ancien marine doté d'une coordination, d'une précision, d'une agilité et d'une vitesse de réactions incroyables qui lui permettent de réaliser les cascades et les mouvements les plus improbables, mais dont la maîtrise s'avère difficile sous l'effet du stress et du manque de concentration dont il fait preuve régulièrement. Rachel Pirzad (Azita Ghanizada) est une jeune femme timide, ancienne linguiste de la CIA, capable d'augmenter considérablement l'un de ses cinq sens, ce qui ne manque pas de lui poser des problèmes de conforts plus ou moins terribles dans sa vie de tous les jours. Au cours de la saison deux, une nouvelle alpha rejoint l'équipe : Kat (Erin Way), une jeune femme capable d'apprendre n'importe quoi et de le réaliser en quelques heures, mais dont la mémoire à long terme s'efface régulièrement après une période de quelques mois. Parmi d'autres personnages récurrents d'importance, on citera également Nathan Clay (Mahershalalhashbaz Ali), l'agent du gouvernement chargé de servir de liaison avec l'équipe du docteur Rosen et qui se méfie des Alphas et le mystérieux et charismatique Stanton Parish (John Pyper-Ferguson), un puissant alpha ancien et visiblement immortel qui oeuvre dans l'ombre afin de pousser les siens à se révolter pour de bon.
Oui mais...c'est bien ?
A première vue, disons que le concept de « Alphas » peut ne pas paraître très sexy : le coup du groupe de personnes qui se retrouvent dotées de super pouvoirs et qui luttent contre ceux qui les utilisent à mauvais escient tout en luttant pour se faire accepter par une société et un gouvernement qui le rejette, ça n'a rien de nouveau. De « X-Men » à « Heroes », on pourrait avoir l'impression qu'on a fait le tour de la question et qu'il serait inutile d'en offrir une nouvelle lecture Et pourtant et ce contre toute attente, « Alphas » fonctionne plutôt bien. La série n'hésite pas à utiliser de vieilles ficelles du genre tout en y apportant une patte particulière qui permet de l'individualiser. Et, au final, elle offre un spectacle des plus appréciables, qui trouve non pas son originalité dans son propos mais dans la manière dont il est présenté. Ce qui marche vraiment, à mon sens, et qui lui permet de se démarquer, c'est le fait de ne pas faire dans le grand spectacles. Les alphas de la série sont certes dotés de capacités extraordinaires, mais vous n'en trouverez pas qui cracheront des torrents flammes, tireront des lasers par les yeux, voleront dans le ciel ou soulèveront un camion d'une main. Leurs dons restent ancrés dans une sorte de réalité qui rend peut-être l'identification plus facile, et il est quelque part reposant de voir que malgré le côté fantastique de la série, tous ces personnages restent quelque part profondément normaux. Outre le fait d'éviter à la série de puiser trop en avant dans son budget pour délivrer de flamboyants effets spéciaux, ce concept de « pouvoirs extraordinaires mais pas trop » contribue à donner un côté plus terre à terre à l'ensemble, de même que le fait qui fait que ces pouvoirs sont rarement sans effets secondaires : Bill ne peut pas utiliser sa force augmentée trop longtemps sous peine de stresser son corps et, plus particulièrement, son coeur ; Rachel doit en permanence lutter contre ses sens exacerbés, ou la moindre odeur, la moindre tâche, le moindre contact physique peut s'avérer épouvantablement éprouvant ; Kat peut apprendre n'importe quel art, n'importe quelle technique, n'importe quel savoir-faire en l'étudiant quelques heures, mais est incapable de se rappeler de son existence passée au-delà de quelques mois et voit sa mémoire à long terme se « rebooter » régulièrement... Et quand ce ne sont pas les pouvoirs eux-mêmes qui ne sont pas néfastes directement pour leurs utilisateurs, ce sont les défauts de ces derniers qui risquent de les mettre en danger : Nina lutte contre l'addiction du pouvoir total que sa voix lui donne sur autrui, les insécurités de Cameron l'empêchent de toujours réussir à se concentrer assez pour user de son don dans un moment critique, l'autisme de Gary le coupe de la réalité et contribue à le faire s'enfoncer plus encore dans son monde étrange où toutes les communications sont interconnectées... Et tandis qu'il fait son possible pour les aider à vivre en paix avec leurs pouvoirs et leurs soucis de tous les jours, le docteur Rosen n'est pas non plus exempt de difficultés et de travers : jongler avec toutes ces personnalités, tempérer les ardeur du gouvernement, et n'hésitant pas, parfois, à utiliser les aptitudes des alphas pour progresser dans sa farouche campagne contre celui qui deviendra sa némésis, l'immortel Stanton Parish. Et c'est là toute la véritable force de la série, celle de nous présenter des personnages certes dotés de dons extraordinaires mais aux prises avec une vie, elle, bien ordinaire. Aucun d'entre eux n'est parfait, et travailler ensemble est un défi de tous les instants ; mais qu'il est agréable, au final, de voir un véritable groupe de protagonistes (héros serait un terme un peu fort pour les décrire, d'autant que ce n'est pas là le but de la série) dotés de telles capacités oeuvrer ensemble (quelque chose que « Heroes », par exemple, n'avait finalement que très peu mis en avant) ! Et ces personnages et leurs problèmes sont très bien servis par un très bon casting, avec tout de même en tête David Strathairn, excellent dans son rôle de docteur de prime abord sage et fédérateur mais néanmoins prêt à tout pour suivre ses convictions, même lorsqu'elles le poussent à abuser de son pouvoir et de son influence sur les alphas qu'il est censé guidé (rien n'est jamais tout noir ni tout blanc dans « Alphas », et c'est là un autre point fort de la série). Je noterai aussi la réellement très bonne performance de Ryan Cartwright dans le rôle de Gary ; incarner un personnage souffrant d'autisme est quelque chose de délicat qui peut souvent mener à en faire trop ou pas assez, finissant par inadvertance à tourner le rôle en dérision ; ce n'est pas le cas de Cartwright, qui livre une prestation des plus convaincantes, tour à tour touchante, drôle et agaçante et qui donne au personnage de Gary une réelle profondeur au-delà de son handicap. Et rien que pour ça, je dis chapeau !
Pour le reste, « Alphas » ne sort pas trop des sentiers battus, proposant une trame de fond somme toute assez classique sur fond de complot révolutionnaire alpha et des inévitables dissensions avec le gouvernement. L'écriture est cependant assez maîtrisée pour éviter l'ennui, et c'est avec plaisir qu'on suit ce groupe de personnages aussi humainement touchants et agaçants (dans le bon sens) essayer de travailler ensemble et de trouver leur place en ce monde, et on s'attache vite à chacun d'entre eux. On a envie de les voir évoluer et de les voir grandir, et dans ce domaine, « Alphas » dispose à mon avis d'un potentiel plus que certain qui ne demande qu'à être développé de plus en plus au fil des épisodes !
Bref...
Les +
-des personnages intéressants et humains, avec leurs défauts et auxquels on s'attache sincèrement, incarnés par des acteurs de talent
-un côté très terre à terre dans la manière de raconter cette histoire vieille comme le monde de gens dotés de pouvoirs qui évite la grandiloquence ou la démesure
-un vrai groupe de personnages de type « super-héros » (mais pas trop) qui oeuvrent réellement ensemble
Les -
-ça reste effectivement un concept vieux comme le monde, à la base
-un rythme parfois un peu bancal, mais la série finit par trouver sa vitesse de croisière
Bref, « Alphas » est une série qui vaut plus pour son exécution que son propos de base. Ce qui n'empêche pas ce dernier et la trame qu'il sert de se suivre avec plaisir, mais il ne faut pas s'attendre à de grandes surprises. Mais la véritable force de la série réside dans ses personnages, incroyablement crédibles et attachants pour des individus dotés de capacités extraordinaires. Si vous attribuez ne serait-ce qu'un poil plus d'importance aux personnages qu'à la trame (qui n'est pas mauvaise, je le rappelle, juste assez basique, du moins pour le moment), et que vous avez envie de voir une version très terre à terre du vieux concept des « super-héros », alors vous passerez très certainement un très bon moment !