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Plume de Renard - Page 80

  • Trois heures trente, seconde partie

    Voici la seconde et dernière partie de cette petite histoire improvisée, j'espère que ça vous aura plu! ^_^;

     

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    "Fausse alerte. Le souffle de votre compagne redevient rapidement régulier. Sans trop savoir pourquoi, vous n’avez pas particulièrement envie qu’elle se réveille maintenant. Ca signifierait discuter, et vous n’en avez pas franchement envie. D’autant plus qu’elle critiquerait votre sale manie avant de vous piquer derechef une cigarette. Allez comprendre…

     

    Toujours avec le moins de bruit possible, vous déposez votre bâton de la mort dans le cendrier et attrapez l’ordinateur portable qui traîne en permanence sous votre lit quand vous ne l’utilisez pas. Assis en tailleurs sur votre bord de lit, la machine qui démarre sur vos genoux, vous enfoncez vos fidèles écouteurs dans vos oreilles et clignez des yeux devant la lumière de l’écran. Votre premier réflexe est d’enclencher votre playlist, et la musique s’écoule dans votre tête, contribuant à vous calmer. Cela fait longtemps que vous n’avez pas eu besoin de recourir aux médicaments prescrits par votre psychiatre, et vous aimeriez bien que cela continue.

     

    Perdu dans vos pensées, vous ne savez même pas pourquoi vous l’avez allumé, votre ordinateur. En fait, c’est devenu une sorte de réflexe moderne qui vous effraie. Vous ne savez pas quoi faire ? Zou, vous allumez le pc ! Alors que vous avez des bouquins à lire, des textes à écrire et tant d’autres choses à faire, vous vous retrouvez à errer bêtement sur le net, à relire les mêmes informations et à, avouons-le, perdre votre temps. C’est terrifiant. Cela dit, vous croyez voir que l’un de vos dessinateurs préférés à posté une nouvelle note (les auteurs de bds, comme les écrivains et les proxénètes, possèdent un rythme de vie plus ou moins irrégulier)…

     

    Vous esquissez un sourire…et manquez vos étouffer sous la surprise lorsque deux bras viennent entourer vos épaules pour plaquer les mains froides qu’ils ont au bout contre votre torse (qui n’avait rien demandé à personne).

     

    « Tu ne dors pas ? »

     

    Parfois, la perspicacité de la créature de vos rêves vous étonne, tout comme les phrases toutes faites que les gens emploient. Vous ne dormez pas assis en tailleurs, que vous sachiez ! Vous préparez une remarque acide dont vous avez le secret, mais son souffle chaud dans votre cou vous radoucit (voilà où est passée toute la chaleur qu’elle vous a vampirisé !).

     

    Décidée à vous agacez, la demoiselle vous débarrasse de vos précieux écouteurs et chuchote exagérément fort dans votre oreille :

     

    « Houhou ? Qu’est-ce que tu fais ? »

     

    Sans attendre de réponse –comme à son habitude- elle pose sa tête sur votre épaule, encercle votre ventre (moins d’athlète celui-là) de ses bras nus et lit par-dessus votre dos, ce que vous détestez. Elle sait que vous détestez. Vous savez qu’elle sait que vous détestez. Elle sait que vous savez qu’elle sait que vous détestez. C’est beau, la vie de couple.

     

    « Ce type est marrant, même à trois heures… » Elle jette un bref coup d’œil sur le réveil. « …trois heures trente sept du matin. » Elle parle de la note de blog. Vous, vous êtes marrant tout le temps, tout le monde le sait ! « Tu vas rester assis comme ça encore longtemps ? »

     

    Sans écouter la réponse que vous commencez à balbutiez, elle baille et fait le tour pour se lever.

     

    « Du coup, j’ai soif. T’as fumé, toi ! »

     

    Vous ne niez pas, occupé à la contemplez, vêtue d’une petite culotte blanche et d’un de vos vieux t-shirt (ça vous apprendra à lui offrir la somptueuse nuisette de ses rêves à son dernier anniversaire, tiens…). Sans cesser de bailler à s’en décrocher la mâchoire, elle se sert un verre d’eau à la cuisine ; vous entendez l’eau cogner contre le métal de l’évier. Lorsqu’elle revient, c’est pour s’emparer de la cigarette qui se consume dans votre cendrier et la coincer entre ses lèvres.

     

    A vos protestations, elle réponde par le haussement de sourcil qui fait que vous damneriez pour elle sans hésiter une seule seconde :

     

    « Pour moi c’est pas pareil. Tu sais très bien que ça te fait tousser ! »

     

    Elle s’assied à vos côtés, l’une de ses longues jambes par-dessus l’autre.

     

    « Qu’est-ce que tu as ? Je ne t’ai pas assez fatigué tout à l’heure ? » Elle glousse, de ce petit rire qui a fait chaviré votre cœur il y a trois ans.

     

    Mais ce soir, les angoisses sont là, et vous ne savez pas comment les partager. Vous tentez de lui dire que vous voulez rester seul, pour vous apitoyer tranquillement sur votre sort et toutes ces choses que l’on fait lorsqu’on a l’impression que le monde entier vous en veut à vous, personnellement. Et cette histoire de livre vous trotte dans la tête. Votre éditeur n’est guère loquace, et vous ne savez toujours pas comment interpréter les « Hon hon » du bonhomme lorsqu’il feuilletait distraitement votre dernier chapitre.

     

    Vous avez envie de parler, de déverser votre peur irraisonnée en la partageant avec votre cher amour, de vous laissez happer par la spirale infernale, de casser des assiettes et de repartir chez votre mère qui réussit, elle, très bien le gâteau au chocolat (votre compagne s’entend avec les fours comme vous avec les briquets). Malgré votre appartement, malgré la splendide et aimante –bien que taquine- créature qui partage votre vie, malgré votre chat qui dort dans une de vos vieilles pantoufles en ronflant, vous avez la furieuse envie de vous lever, de renverser quelques meubles (mais pas des gros meubles, vous avez le dos fragile) et de claquer la porte pour vous enfuir. Partir loin, comme vous faisiez avant lorsque quelque chose vous donnait la sensation d’étouffer. D’être emprisonné, de rester bloqué. Incompris.

     

    Vous allez ouvrir la bouche, vous allez lâcher la bombe, persuadé que c’est la seule chose à faire…lorsque votre compagne ferme délicatement l’écran de votre ordinateur pour venir vous embrasser dans le cou.

     

    « Et si on recommençait ce qu’on a fait tout à l’heure, mmhm ? »

     

    Vous vous laissez entraînez sous les draps tandis que vos mains se glissent sous votre vieux t-shirt qu’elle porte et dont elle dit tant aimer la fragrance rassurante. Et soudain, vous n’avez plus peur. Vous vous sentez bien. Les angoisses ne sont pas parties, elles reviendront sans doute. Mais vous êtes enfin chez vous.

     

    Il est passé trois heures trente du matin, et tout va bien."

     

  • Trois heures trente, première partie

    Pour changer un peu, vous avez décidé de publier ici une historiette qui vous trotte dans la tête depuis quelques heures. Vous n'avez aucun plan; comme d'habitude, vous laissez les mots venir les uns après les autres, au gré de votre inspiration. Vous ne savez pas pourquoi vous avez eu envie d'écrire une telle histoire, mais le fait que quand l'inspiration toque à la porte, on ne la laisse pas poireauter sous le porche.

     Une précision cependant: l'histoire qui suit est écrite à la forme du "vous", comme vous en avez l'habitude, mais aucun des personnages n'est réel (la preuve: vous ne fumez pas, vous). Du coup, le "vous/narrateur" n'est pas...vous, et la créature de ses rêves n'existe pas non plus. Vous dites ça pour qu'aucun de vos chers amis qui passent dans le coin ne se fassent des idées comme à leur habitude. 

     Sur ce, voici la première partie!

     

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    "Votre main émerge à tâtons de la couverture pour agripper mollement le réveil matin qui lui faiblement sur votre petite table de nuit du dix-neuvième. Après votre main, c’est l’un de vos yeux –celui que vous sacrifiez à la lumière après de longues heures dans l’obscurité- qui suit pour se poser sur l’heure : trois heures trente du matin.

     

    Ouais. Super. Vous n’avez pas besoin de faire un dessin pour expliquer la situation : vous n’arrivez pas à dormir. La créature qui dort à vos côtés monopolise le gros des draps et, comme d’habitude, a vampirisé toute la douce chaleur de votre corps d’athlète (bon, d’accord, un athlète sur le retour qui se laisserait aller un chouïa sur le chocolat devant le film du vendredi soir, mais un athlète quand même) en y collant des petits pieds aussi glacés que le regard de votre ancien professeur de mathématiques lorsque vous aviez oublié votre compas.

     

    Bon, il est trois heures trente du matin et vous n’avez pas encore fermé l’œil. Ou en tout cas, vous n’avez pas dormi. Peut-être est-ce parce que les voisins du dessus ont encore laissé éclater leurs différents pour le grand ravissement de vos oreilles curieuses avant de se réconcilier tout aussi brillamment, ou parce que ces réconciliations là ont déteint sur l’humeur de la créature de vos rêves qui s’est soudainement sentie très câline. Ou alors vous n’auriez pas dû boire ces tasses de café avant de vous mettre au lit. Ou peut-être encore est-ce votre imagination débordante qui n’arrête pas de travailler sur votre prochain projet attendant tranquillement d’être présenté à un éditeur qui saura voir le génie visionnaire dont vous faites preuve. Si si, visionnaire, parfaitement !

     

    Mais visionnaire ou pas, vous ne pouvez pas dormir. Silencieusement, avec autant de précaution qu’un lapin dans un terrier de renards, vous vous glissez totalement hors des draps. Votre chère et tendre, bien qu’endormie, saute sur l’occasion pour s’enrouler dans l’entier des draps. Tant pis, vous irez chercher une couverture plus tard dans l’armoire. Vous espérez simplement qu’il n’y aura pas que celle que tante Josiane vous a tricoté pour Noël dernier, la laine irrite votre peau de pêche (pêche d’athlète, comme on le sait).

     

    Du coup, vous vous retrouvez en boxer assis sur la portion de matelas qui vous est allouée dans le deux pièces et demi que vous partagez avec la créature de rêve. Le coude sur la cuisse, le menton dans la main, vous fouillez la semi-obscurité du regard. Les lueurs de la vie nocturne que laisse passer la fenêtre –en plein été vous ne prenez pas la peine de fermez les stores- projette sur les murs des ombres diaphanes. Au loin, les rires cristallins des jeunes plein d’avenir qui rentrent de soirée parviennent à vos oreilles, tandis que les étoiles au firmament… Putain de merde, où a bien pu passer votre paquet de cigarettes ?

     

    Agacé, vous ouvrez le plus délicatement le tiroir (du dix-huitième, celui-ci ; les antiquaires aiment bien bricoler) de votre table de nuit et en tirez un paquet de clopes à moitié entamé. A vrai dire, vous ne fumez presque jamais : après l’amour particulièrement intense, lorsque vous attendez fébrilement que l’éditeur vous envoie son retour ou lorsque, comme cette nuit, le sommeil vous fuit et les angoisses vous habitent.

     

    Les fameuses angoisses… Voilà un moment qu’elles ne vous avaient pas rendu visite celles là. Du coup, vous êtes un peu étonné qu’elles vous retombent dessus comme le papier peint de la salle de bain (vous attendez encore le professionnel qui doit s’en charger ; visiblement, son dîner a pris plus de temps que prévu.). La main autour de la clope, vous grattez une allumette –les briquets ne vous aimant pas, vous y avez renoncé ; le dernier a explosé dans votre poche- et vous tirez une première bouffée salvatrice. Vous détestez le goût du tabac, quel qu’il soit, mais vous continuez quand même.

     

    Votre gorge n’apprécie guère ; vous toussez. Derrière-vous, vous entendez la douce créature bouger.

     

    Et merde..."

     

  • "Un ami qui me comprenne, et des livres par centaines..."

    La vie n’est pas seulement comme mettre un chat dans une baignoire, elle est aussi –mais ça vous ne l’apprendrez à personne- compliquée. A vrai dire, s’il s’avère que vous l’apprenez à quelqu’un qui ensuite vous dira « Non non, moi je trouve pas. Rien de plus simple, tout baigne. Pas d’problèmes, ah ah. », vous aurez là tout de suite l’envie de lui proposer d’échanger la sienne avec la vôtre. Comme ça, pendant que le faquin devra composer avec celle que vous lui laissez, vous pourrez mesquinement ficher le bordel dans la sienne. La vie est compliquée, point. Ce qui n’empêche pas de bien la vivre, attention ! Même si, parfois –et même souvent- vous avez un peu de peine…

     

    C’est comme l’art de la conversation : vous ne savez pas comment vous y prendre. Tiens, pas plus tard que tout à l’heure tandis que vous promeniez votre chienne, un vieux promeneur inconnu mais sympathique que vous avez croisé a engagé la conversation sur « le temps qu’il fait » (c’est une obsession, ma parole, le temps qu’il fait, chez les gens !). Or, vous êtes tout bonnement incapable de tenir une telle conversation. Vous vous êtes donc retrouvé à bafouiller comme un gamin appelé devant la classe. Le vieux promeneur inconnu mais sympathique (à la sémillante moustache, pour ceux qui aiment les détails) a dû vous trouver bien bizarre.

     

    Bref, votre vie, vous aimez bien la vivre, mais vous n’avez pas pour autant l’impression de la vivre pleinement. Toujours cette satanée sensation d’incomplet, comme s’il manquait des pages à votre livre ; qu’on avait laissé les chapitres d’exposition en oubliant les paragraphes qui vous donneraient les clefs de lecture. C’est fou ce qu’on peut faire avec un livre, des métaphores aux coups de dictionnaire sur la tête des importuns. Bien sûr, le mieux c’est encore de les lire. Mais qui lira celui que vous êtes, hein ?

     

    Au travers de discussions forts intéressantes, vous en arrivez à la conclusion que vous êtes finalement assez seul. Oh, vous avez une famille et des amis qui vous aiment –et que vous aimez aussi- mais vous n’avez pas l’impression de vous sentir compris pour autant. Vous avez l’impression de ne dévoiler certaines parties de vous-même qu’en présence de tel ou tel personne –même proche- de votre entourage, tandis que vous en dissimulez d’autres. Du coup, vous pensez n’être jamais vous-même et pour finir vous ne savez même pas qui vous êtes vraiment. Vous ne vous sentez pas complet, même auprès de ces personnes qui vous aiment, parce que vous avez sans cesse l’impression d’être tiraillé et de vous adapter à votre interlocuteur. Parfois, vous rêvez d’avoir une personne dans votre vie auprès de qui vous pourriez simplement vous trouvez sans avoir besoin d’exacerber l’un ou l’autre trait de votre caractère tout en en taisant d’autre. Quelqu’un qui pourrait vous prendre dans ses bras en silence, sans vous harceler avec des « maisquestcquivapas ? » dont sont coutumiers les membres de votre famille à qui vous arrivez à vous confier et vos rares amis à qui vous vous laissez aller à livrer certains aspects de vous-mêmes. Pour vous, un ami ce n’est pas seulement quelqu’un qui vous parle et vous abreuve de conseils et de vérités, mais aussi quelqu’un qui sait se taire, et simplement rester avec vous sans toujours chercher à savoir. Un tel silence –qui n’en serait finalement pas un- vous apparaîtrait alors comme une des plus belles preuves d’amitié. Mais comme vos amies et amis –que vous aimez beaucoup, hein- ne sont pas du genre à ça et qu’ils ont plutôt tendance à vous assénez dès « je le savais/je t’expliquerai/je te l’avais bien dit/je ne te comprends pas, moi je… », vous n’avez encore pas trouvé une telle chose. Les gens se contentent de laisser un marque-page ici et là aux passages qu’ils comprennent, mais aucun n’a le courage de lire le livre entier, voilà tout.

     

    C’est là qu’intervient le titre de votre note. Cette phrase est en fait tirée d’une chansonnette du film de Disney « La Belle et la Bête » (oui, vous aimez bien les Disney ! Un problème ?) qui en plus d’être votre dessin animé préféré (pas seulement chez Disney, mais en général) a eu le génie de mettre en scène le personnage de Belle, qui vous paraît bien moins gourde que grand nombre d’héroïnes. Et l’un des passages chanté par la belle (ah ah) dit ceci :

     

    « Je veux m'envoler dans le bleu de l'espace,
    Je veux tout ce que je n'ai pas :
    Un ami qui me comprenne
    Et des livres par centaines,
    Sans m'occuper des gens qui jacassent. »

     

    C’est fou comme il suffit parfois d’un simple dessin animé ou d’une chanson pour entendre les phrases qui nous parlent. Comme quoi, pas besoin de les chercher dans des bouquins de philosophie rédigés par des types qui écrivent comme s’ils présentaient un théorème. En tout cas, ces quelques mots vous définissent très bien... S’envoler ailleurs, vouloir ce que vous n’avez pas, arriver à ne plus vous soucier de ce que tout le monde pense et, surtout, « un ami qui me comprenne, et des livres par centaines. » Même gosse, ce passage là vous scotchait devant la télé tellement c’était –c’est encore d’ailleurs- ce que vous n’étiez pas arrivé  à exprimer vous-même tout en s'accordant à votre amour de la lecture. Au moins, vous avez sans doute des centaines de livres (en tout cas une). Cela dit vous n’avez pas le temps de tous les lire, et celui que vous êtes reste toujours fermé, incomplet, comme un vieux bouquin rongé aux mites posé sur une étagère. D’ici à ce que quelqu’un le prenne au lieu du livre flambant neuf avec sa belle couverture mis en évidence devant les rebuts, vous avez sûrement le temps de voir venir et d’angoisser en vous posant plein de questions.

     

    Si vous affectionnez les Disney, il est vrai que ce n’est pas quelque chose de réel : la vie est compliquée. Mais ça, vous ne l’apprendrez à personne…